OCT 2019
Le système langue-palais est capable de détecter de fines variations de texture en bouche là où le meilleur des rhéomètres est essentiellement aveugle. Une hypothèse pour expliquer cette remarquable sensibilité repose sur la présence de myriades de papilles filiformes sur la surface de la langue et de mécanorécepteurs à leur base.
Pendant cette thèse, nous avons développé une approche biomimétique reproduisant le fonctionnement de la cavité orale. La langue est un bloc d'élastomère décoré de cylindres allongés assimilés à des papilles filiformes. Elle est placée sur le bas d'une cellule de rhéoscope, combinaison d'un rhéomètre et d'un microscope. L'outil rotatif du rhéomètre joue le rôle du palais rigide, et impose l'écoulement du liquide testé.
Nous avons imagé sous cisaillement de fluides simples la déflexion d’une papille et montré que celle-ci est proportionnelle aux contraintes visqueuses, en parfait accord avec un modèle élastohydrodynamique récent. Nous avons sondé la déflexion d’une papille en présence de suspensions granulaires, modélisant des émulsions alimentaires. Nous avons montré que la présence de particules dans la phase continue modifie peu la déformation moyenne d'une papille, mais fortement l'écart-type autour de cette déformation, principalement à cause des collisions particules/papille. Enfin, nous avons étudié l’effet des interactions entre papilles en variant leur densité surfacique. Cette déflexion diminue avec la densité. Un modèle phénoménologique, qui traite le tapis de papilles comme un milieu poreux effectif, décrit avec succès nos données sur toute la gamme de densité.